
Mon processus artistique combine art, narration et écologie pour façonner des réalités alternatives au sein de milieux industriels ou ruraux. J'explore et spécule sur des futurs environnementaux tout en réinterprétant les mémoires et les histoires de territoires marqués par l’exploitation, l’activité industrielle, la restauration ou la reconversion de sites anthropiques.
Journal de pratique, MB
Démarche artistique
Ma pratique artistique s’inscrit dans le champ de l’art environnemental, en mobilisant une esthétique de la réparation et une éthique de la sollicitude (care), où la création devient un geste attentionné envers les milieux perturbés, les matières résiduelles et les formes de vie invisibilisées. Depuis plus de quinze ans, je développe une approche interdisciplinaire en sculpture, installation et arts de l’objet, à la croisée de l’écosophie, des technologies numériques et des narrativités situées. Mes œuvres s’ancrent dans des contextes affectés — friches industrielles, sites miniers désaffectés, forêts incendiées — que je considère comme des matrices actives, porteuses de mémoire matérielle, de récits enfouis et de forces latentes de régénération.
Ma démarche explore la narrativité comme mode d’émergence du sens à travers les matières, les formes et les contextes. J’aborde la narration non pas comme une construction linéaire, mais comme un tissage de relations sensibles entre objets, territoires, temporalités et imaginaires. Chaque projet devient un espace de résonance entre le geste artistique, les dynamiques de transformation de la matière — organique, minérale, sonore ou numérique — et les devenirs possibles des lieux anthropiques. La matière elle-même participe à l’écriture : elle porte les traces du vivant, de l’histoire, de l’altération, mais aussi des récits spéculatifs et des futurs latents.
À travers un travail in situ, des dispositifs immersifs ou des processus génératifs, je conçois des formes que je nomme « architectures éphémères » ou « écosystèmes intelligents », porteurs d’un potentiel critique et sensible. En mobilisant des outils tels que la fabrication numérique, la simulation 3D, l’intelligence artificielle ou les biotechnologies, je développe des matériaux biosourcés, réactifs ou hybrides, ouvrant la voie à des processus expérimentaux et collaboratifs. Cette recherche-création transdisciplinaire articule les arts visuels, les sciences naturelles, l’ingénierie et l’écologie profonde dans une logique de co-création avec les milieux humains et plus-qu’humains, c’est-à-dire les êtres vivants non humains (animaux, végétaux, champignons, micro-organismes), mais aussi les entités matérielles (géologiques, atmosphériques ou technologiques) avec lesquelles nous partageons un monde en devenir.
Mon approche s’inscrit dans une pensée spéculative et une poétique du symbiocène où la cohabitation entre humains et entités plus-qu’humaines devient une condition éthique et esthétique. Elle se nourrit autant des humanités environnementales que des technologies émergentes, permettant de faire émerger des récits hybrides, critiques et éco-poétiques. En ce sens, ma démarche engage un dialogue constant entre altération et régénération, disparition et réinvention, en invitant à repenser notre rapport au vivant, aux matières que nous transformons, aux milieux que nous habitons et contribuons à faire advenir.
Bio
Mon parcours a débuté par une immersion profonde dans l'art et la recherche, avec l'obtention de deux doctorats : l'un à l'Université du Québec à Montréal en Pratiques et Études de l'Art, et l'autre à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne en Arts et Musicologie. Au cours des 15 dernières années, mon travail artistique a été présenté dans plus de 60 expositions internationales, du Musée des Beaux-Arts de Montréal (Canada) au Forum des Images et aux Rencontres Internationales à Paris, et de la Haus der Kulturen der Welt à Berlin à l'Asahi Art Square à Tokyo.
Depuis 2017, je suis impliqué dans des projets universitaires et associatifs. J'ai fondé et dirige le Laboratoire intersectoriel d'impression 3D pour les arts, les sciences naturelles et le génie à l'Université du Québec, où je favorise la collaboration entre les universités, l'industrie et les communautés culturelles. Je suis également membre d'Hexagram, un réseau international dédié aux arts médiatiques, au design, aux technologies et à la culture numérique, ainsi que le Réseau de de Recherche en Économique Circulaire du Québec - RRECQ.
Au cours des sept dernières années, j'ai obtenu des subventions de recherche (1 500 000 $) octroyées par des institutions telles que le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH), le Fonds québécois de recherche sur la société et la culture (FRQSC) et le Fonds des leaders Johan-R.-Evans. Ces subventions ont soutenu le développement de nouveaux écomatériaux et de pratiques artistiques innovantes abordant des enjeux environnementaux pressants comme les changements climatiques. Grâce à ces efforts, mon travail incarne un engagement à allier art, science, technologie et engagement communautaire. Chaque projet témoigne de ma volonté d'explorer de nouvelles frontières et de contribuer au progrès artistique et sociétal.